SOCIÉTÉ NATIONALE DE L'HISTOIRE ET DU PATRIMOINE DE LA GENDARMERIE | SOCIÉTÉ DES AMIS DU MUSÉE DE LA GENDARMERIE

La Gendarmerie nationale est une institution originale qui a su résister aux vicissitudes de l’histoire, aux régimes politiques et aux conflits qui ont façonné la destinée de notre pays.
Troupe au service de la justice royale, puis force militaire de justice avec les nouvelles maréchaussées, gendarmerie impériale et enfin Gendarmerie nationale de façon définitive, il est évident qu’elle a dû s’adapter pour être toujours et de façon plus juste, au service de la France et de ses citoyens.
Cette évolution s’est fait sans jamais renier son passé et ses valeurs. De ce constat il reste des traces parfois imperceptibles tant elles font partie du code, du savoir être. Cependant il existe des marques visibles qui portent et transmettent les messages et l’histoire.
Partons ensemble à la découverte de ce patrimoine, puisqu’il s’agit de cela, de richesses, de valeurs et de rites hérités de nos anciens. Ce patrimoine sera dénommé « de tradition » puisqu’il rassemble un corpus d’objets clairement identifiés et constitués, porteurs de sens, de normes, de traditio

LES INSIGNES

La gendarmerie s’est dotée d’insignes un peu plus tardivement que les autres armées. On peut identifier un essor  dans la pratique vers le milieu des années 30 et une véritable expansion durant la Seconde Guerre mondiale. Avec la normalisation des règles de la symbolique militaire intervenue en 1945, la gendarmerie a pleinement intégré le concept et la quasi-totalité des formations dans l’ex-empire et en métropole était dotée d’insignes d’unités.

En 2009, on peut classer les insignes de la gendarmerie en trois grandes catégories :

• la plus importante, grâce à sa légitimité historique et sa force symbolique, est l’insigne d’unité appelé aussi insigne de tradition. Il est la marque de la formation et il constitue le lien entre les générations de militaires ayant appartenu au corps. L’insigne de l’unité est la marque visible de l’appartenance à une même communauté, à un même corps. Il matérialise l’implantation territoriale des militaires de la légion et à ce titre constitue un signe de reconnaissance entre gendarmes, mais aussi un signe de proximité avec les collectivités régionales et les habitants. Représentant le plus souvent une partie des blasons des anciennes provinces, l’insigne  évoque fortement les liens qui unissent les unités départementales avec les régions. Pour les formations spécialisées ou autonomes (gendarmeries de l’air, maritime, écoles …) Les signes retenus illustrent souvent la spécificité missionnelle ou les techniques mises en œuvre ;

• la deuxième catégorie rassemble les insignes des promotions d’officiers-élèves et des élèves-gendarmes. Ces insignes sont la marque de l’identité de la promotion, entité militaire collective temporaire, en formation. Cette pièce rassemble les meubles caractéristiques qui illustrent l’état militaire associés à des symboles évoquant le sacrifice du parrain de la promotion ;

• dernière catégorie, celle qui voit le plus de création depuis que la gendarmerie gère seule sa symbolique, les insignes de brevet ou de spécialité.

À l’heure où la formation devient de plus en plus diversifiée et complexe, il a semblé opportun de créer des insignes reconnaissant les qualifications professionnelles que détiennent les militaires de la gendarmerie.
C’est aussi dans cette thématique qu’apparaissent les plus grandes dérives. En effet de très nombreux écussons brodés sont créés sans contrôle ou harmonie au profit de micro- unités ou de qualifications techniques qui n’ouvrent pas droits à un écusson . Ces écussons  font souvent double emploi avec d’autres pièces.


LES EMBLÈMES

Le terme généraliste emblème recouvre en fait différents objets ayant chacun une fonction spécifique. En effet il convient de distinguer l’emblème national des autres attributs aux fonctions toutes distinctes.
Le drapeau est l’emblème d’une formation à pied ; il représente un des biens les plus précieux du corps. Il naît avec lui et disparaît lors de sa dissolution. À certaines périodes de l’histoire, le chef de corps avait pour obligation de le conserver à son domicile. Il est toujours accompagné de sa garde lorsqu’il se déplace.
À l’occasion des manifestations militaires (défilés, prises d’armes), les honneurs lui sont rendus par les troupes dès lors qu’il se présente ou qu’il quitte la place.
Le drapeau supporte les inscriptions suivantes : nom et numéro du corps, devise(s), inscriptions de batailles accordées. Une cravate est placée en haut de la hampe sur laquelle s’accrochent les décorations. Les éventuelles fourragères sont quant à elles accrochées à l’anneau de cravate. Le bout de la hampe se termine par un fer de lance qui est l’attribut actuellement en vigueur dans les armées. Le drapeau est formé d’un carré de 90 centimètres de côté ; il est bordé de franges or.
Ces spécifications sont valables pour l’étendard qui est l’emblème de dotation des unités de cavalerie ou des unités de traditions montées (matériel, arme blindée…). L’étendard est cependant de dimension plus réduite ; il est formé d’un carré de 64 centimètres de côté.
Les fanions sont les attributs des unités subalternes des corps. Pour la gendarmerie, il s’agit des bataillons, des groupements et des unités élémentaires.
Les flammes et les tabliers sont des attributs ornementaux qui sont accrochés aux trompettes et clairons pour les premiers, et aux tambours, grosses-caisses et timbales pour les seconds. Ils portent généralement les insignes, les armes ou les devises du corps auquel la formation musicale est attachée.
Au-delà des éléments de la symbolique militaire présentés ci-dessus, il convient aussi d’examiner les différents symboles présents sur les tenues des militaires de la Gendarmerie nationale. Ceux-ci sont importants car ils véhiculent des messages et matérialisent une tradition ou un héritage. Parfois, au fil du temps, la représentation physique a pu changer, mais le symbolisme reste identique.


LA GRENADE

Symbole des unités d’élite sous l’Ancien Régime, la grenade, ou bombe enflammée, ne fait pas partie du patrimoine symbolique de la maréchaussée. Elle apparaît avec la création de la Gendarmerie nationale. Initialement attribuée aux grenadiers gendarmes chargés de protéger la représentation nationale, cette marque est étendue dès 1797 à toute la gendarmerie. D’abord portée sur les retroussis, les collets, les coiffures, elle prend au fil des années une place de plus en plus grande sur les uniformes et les équipements. La grenade identifie clairement l’institution malgré la diversité des missions et des spécialités. Elle est unique au sein des armées par sa représentation à huit flammes or ou argent.


LE GALON D’ÉLITE (Galon ruban)

Dans la nomenclature administrative, le terme approprié est celui de galon ruban ; il s’agit en fait d’un ruban de textile qui borde le sommet des képis et des postillons (coiffure des personnels féminins) des militaires de la gendarmerie. Il est argent pour la gendarmerie départementale, les formations qui lui sont  rattachées et pour les militaires du corps de soutien de la gendarmerie. Le galon est or pour la gendarmerie mobile et les officiers et gradés de la Garde républicaine, écarlate pour les gendarmes de la garde républicaine, bleu pour les gendarmes adjoints, Dès la première instruction sur la tenue des nouvelles maréchaussées, il était prévu qu’un large galon d’argent borde les chapeaux.
Sous l’Ancien Régime, cet attribut a  presque toujours été présent sur les différentes coiffures des militaires de la maréchaussée et de la gendarmerie. Cette distinction figurait aussi sur les coiffures des unités de la maison du Roi et, à ce titre, la maréchaussée s’enorgueillait  de ce privilège.


LES AIGUILLETTES

Initialement simple accessoire vestimentaire, l’aiguillette est devenue un attribut distinctif de la cavalerie puis des troupes d’élite. Celle-ci appartient au patrimoine de la gendarmerie depuis que son port fut rendu obligatoire pour la maréchaussée en 1720. L’aiguillette était à l’époque de soie blanche.
Selon les régimes politiques et les évolutions de l’uniforme, elles furent portées, soit à droite, soit à gauche. Le grade ou la fonction du porteur fut aussi, selon les époques, identifié par un code de couleurs : écarlate, bleu, blanc ou panaché. À l’heure actuelle, elles sont portées à gauche avec les deux nattes sur la poitrine et sont en textile blanc. Les ferrets sont or ou argent selon la subdivision d’arme. Pour la Garde républicaine, elles sont panachées or et écarlate avec ferrets or et sont placées avec les brins et nattes apparentes sur la poitrine du fait du port de la tunique.


LA BOUCLE DE CEINTURE À TÊTE DE MÉDUSE

Dans la mythologie grecque, Méduse, Sthéno et Euryalé sont les trois Gorgones. Elles symbolisaient initialement les perversions et l’ennemi à combattre. Méduse était la plus mortelle des sœurs ; elle fut transformée en monstre par Athéna, déesse de la guerre, après être entrée dans le temple de cette dernière. Dès ce jour, qui voyait Méduse se trouvait pétrifié par cette vision d’horreur censée refléter le mal. Le regard perçant de la Gorgone changeait en pierre celui qui la regardait. Persée sut vaincre Méduse et offrit sa tête à Athéna, qui la plaça sur son bouclier.
En 1885, la tête de Méduse prit place sur les médaillons des ceinturons porte-épée des officiers. De nos jours, ce symbole figure toujours sur l’ensemble des ceinturons de cérémonie des militaires des unités de la gendarmerie mobile, de la gendarmerie départementale et de la garde républicaine.
En fait, le symbolisme de cet attribut est d’une double nature. Le fait de posséder la tête de Méduse sur un ceinturon, pièce qui supporte l’arme, évoque la puissance des militaires de l’institution dépositaires de la force publique relevant de l’autorité légale.
Le statut militaire est ici illustré par le fait qu’Athéna fut la première à utiliser ce symbole. Enfin, le message induit par le choix de Méduse montre clairement que tout doit céder à la loi et que les malfaiteurs ne peuvent être que « pétrifiés » devant la force publique agissant pour l’exécution des lois.


UN UNIFORME, DES COULEURS

L’uniforme de la maréchaussée, tel qu’il était codifié par l’ordonnance du 16 mars 1720, reprenait les couleurs de la livrée royale. Il s’agissait principalement du bleu de France et cette nuance s’ajoutaient le rouge, et le jaune pour des buffleteries.
De manière générale, le bleu figura toujours sur les uniformes de la gendarmerie, jusqu’à devenir presque noir pour les vestes à partir de 1921. Le bleu est une nuance intimement liée à l’histoire de France. Selon diverses légendes, elle fut choisie par Clovis pour protéger les troupes lors des combats.
Les uniformes, selon les régimes, virent le jaune  (chamois) apparaître sur les culottes ou les plastrons. Le rouge orna souvent les retroussis et se trouve encore présent sur les tenues des cavaliers et motocyclistes. Le blanc figurait sur les uniformes, mais essentiellement sur les attributs distinctifs (aiguillettes, aigrettes, etc.) ; il est en fait un symbole de commandement et d’honorabilité.
Actuellement, les tenues de la gendarmerie arborent encore les nuances de son illustre devancière : la maréchaussée, cela malgré les siècles écoulés, les changements de régime et les contraintes de l’évolution des effets d’uniforme.
Seule la tenue de service courant mise en place en 2003 laisse moins de champs aux traditions… Mais lors des grands moments ou des cérémonies le gendarme arbore son grand uniforme où il est possible de décrypter des parcelles d’histoire.

Article paru dans la revue Histoire et Patrimoine des Gendarmes.
N° 01/2010 – Auteur ADJ (TA) Richard Filmotte.