SOCIÉTÉ NATIONALE DE L'HISTOIRE ET DU PATRIMOINE DE LA GENDARMERIE | SOCIÉTÉ DES AMIS DU MUSÉE DE LA GENDARMERIE

Le gendarme, un militaire ? À cette question dont le sens caché oscille souvent entre le doute et le soupçon, on peut immédiatement répondre par une autre question. Qu’y a-t-il de commun entre un pilote de chasse, un sergent d’une unité d’infanterie engagée en Afghanistan, un gendarme, un médecin du Val de Grâce, un ingénieur de l’Armement ? Tous sont des militaires. La suspicion vient la plupart du temps de la confusion sémantique entre militaire, combattant et soldat.

Combattant occasionnel (en Indochine), soldat parfois lorsqu’il participe à sa place et avec d’autres, à des opérations extérieures par exemple, le gendarme est toujours un militaire. Il est de rite militaire ; il vit dans une organisation militaire ; il partage les valeurs militaires.

Comme d’autres, il est au service de la nation. Mais pour lui, pas de rentrée solennelle de cour. C’est la liturgie militaire qu’il applique dans son cérémonial, avec les mêmes symboles, les mêmes formules sacramentelles que chez les autres militaires : « Vous reconnaîtrez désormais pour chef… ». L’organisation hiérarchique, véritable colonne vertébrale de tout système militaire, lui est intégralement applicable, de même que la vie en caserne… Mais, rites et organisation hiérarchique ne sont que des formes rendues nécessaires les uns pour sacraliser le sacrifice consenti, l’autre pour garantir la meilleure exécution possible de la mission, le tout visant à solidariser et consolider l’édifice. Le gendarme participe de cette solidarité générique et adhère aux mêmes valeurs que les autres militaires.

A quoi tient donc la singularité militaire du gendarme ? Comme pour les autres militaires, c’est la nature des missions à exécuter et leurs modalités d’exécution qui font leurs différences. La première des différences c’est que la « guerre » du gendarme est continue. Il n’y a pas, pour lui, de temps de paix et de temps de guerre, ce qui l’oblige à une forme de disponibilité particulière, avec des temps d’activité et de repos répartis sur un mode différent de ceux des autres militaires.

La seconde c’est qu’il vit en caserne avec sa famille et qu’il travaille en permanence au milieu de la population. Ce positionnement donne à son action une forme spécifique. Le gendarme ne peut pas se comporter exactement de la même manière qu’un militaire d’une autre armée. Plus contraint que les autres militaires par un cadre juridique strict, il intervient au profit de donneurs d’ordres qui ne sont pas ses chefs hiérarchiques, mais des autorités civiles détentrices des pouvoirs judiciaires et administratifs. Là encore sa manière d’être s’en trouve modifiée.

Enfin son but n’est pas de gagner la guerre mais de maintenir la paix. À ce titre, la crise est sa profonde raison d’exister, qu’il s’agisse de crise intérieure ou de crise extérieure où il apparaît comme le militaire de l’immédiat après-guerre. L’usage des armes n’est pour lui que l’ultime recours.

Telle est la singularité du gendarme qui peut parfois laisser croire à certains, qui veulent la méconnaître, qu’il est bien éloigné de la communauté des militaires. C’est une erreur. Pour l’immense majorité des gendarmes leur sentiment d’appartenance à cette communauté est fort et c’est leur faire injure que de prétendre le contraire.

Général (2s) Georges Philippot