Il y a 100 ans
Le crime d’Angerville
Benoît Haberbusch
Capitaine
Docteur en histoire,
Service historique de la Défense - DEER
Le 31 janvier 1912, vers deux heures du matin, deux cambrioleurs sont surpris en train de dévaliser un magasin de la gare d’Orléans. Plutôt que de se rendre, les deux individus se frayent un passage à coups de revolvers, blessant le sous-chef de gare et un employé. Ils disparaissent à la faveur de la nuit. L’alerte est aussitôt donnée. Les recherches s’orientent vers la gare des Aubrais où leur passage est signalé. Les deux hommes tentent de rejoindre Paris par le train avec leur maigre butin de 140 francs.
Les événements se précipitent à Angerville, lors du contrôle du train par les employés de la gare. Repérés, les deux suspects prennent la fuite. Deux gendarmes d’Angerville, le brigadier Dormoy et son subordonné Sinet, arrivés peu après, se lancent à leur poursuite… à bicyclette. Débute alors une chasse à l’homme à travers champs. Les deux bandits sont rejoints sur la RN 20, au lieu-dit « les Soixante mines ». C’est ici que se noue le drame. Arrivé le premier, le brigadier Dormoy est froidement abattu. Malgré plusieurs coups de feu, le gendarme Sinet porte secours à son chef, tandis que les meurtriers s’échappent. Il transporte son corps sans vie vers l’habitation la plus proche où réside le maire de Guillerval. Le fils de l’édile prend alors la bicyclette du défunt pour diffuser l’alerte. La nouvelle du crime entraîne une large mobilisation pour traquer les auteurs. Malgré leur avance, les deux fugitifs sont finalement interceptés par les gendarmes d’Étampes. À l’issue d’une nouvelle fusillade, l’un se suicide, tandis que l’autre est capturé.
En relatant cette affaire, la presse rend hommage au gradé victime du devoir. « Le brigadier de gendarmerie Dormoy ne laisse que des regrets », lit-on dans Le Petit Parisien. L’émotion suscitée dépasse, du reste, le cadre local. Par ailleurs, le souvenir du sous-officier se perpétue dans le temps à travers une modeste borne érigée à l’emplacement de son décès et un monument plus imposant élevé à Angerville. Gardiennes de la mémoire, la municipalité et la brigade locale organisent régulièrement des cérémonies au pied de cet obélisque.
