SOCIÉTÉ NATIONALE DE L'HISTOIRE ET DU PATRIMOINE DE LA GENDARMERIE | SOCIÉTÉ DES AMIS DU MUSÉE DE LA GENDARMERIE

L’ORGANISATION DE LA GENDARMERIE SOUS LE SECOND EMPIRE

Le décret du 1er mars 1854, portant règlement sur l’organisation et le service de la gendarmerie, reprend en partie et réactualise les dispositions prévues par l’ordonnance de 1820. La gendarmerie est organisée en vingt-cinq légions pour le service des départements, auxquelles il faut rajouter la légion d’Afrique, la gendarmerie coloniale, la gendarmerie d’élite (devenue en 1854 le régiment de gendarmerie à pied de la garde impériale), la garde de Paris et les gendarmes vétérans. La gendarmerie impériale maritime est placée depuis 1832 sous la direction du ministère de la Marine.
Au total, plus de 24 000 hommes sont employés dans la gendarmerie impériale. Celle-ci constitue, par le nombre et le budget, la première force destinée au maintien de l’ordre en France. L’implantation des brigades ne répond pas à des règles bien précises : par le décret du 25 juillet 1850, les gouvernants ont opté pour le principe d’une brigade par canton et cette répartition égalitaire ne s’adapte pas en France à la carte de la criminalité.

LA GENDARMERIE ET LA VIE POLITIQUE

La gendarmerie, à l’instar de l’armée de ligne et de la police, contribue à la réussite du coup d’Etat de Louis-Napoléon Bonaparte. En province, l’événement provoque des réactions violentes : huit gendarmes sont tués, certains en tentant de résister. L’Arme profite pourtant de son soutien au coup d’Etat. L’avenir semble donc prometteur mais il désigne aussi, aux yeux des républicains, la gendarmerie comme une force partisane, zélée et dévouée au régime du Second Empire. Dans l’immédiat, et en récompense des services rendus par une partie de la gendarmerie, le président de la République nomme dans l’ordre de la Légion d’honneur trente-trois officiers et soixante-dix sous-officiers.
La participation de la gendarmerie à la police politique a entaché son image. Le décret du 1er mars 1854 interdit pourtant formellement à la gendarmerie de  » recevoir des missions occultes, de nature à lui enlever son caractère véritable  » ; néanmoins l’Arme participe activement à des tâches de renseignement. Toute l’administration, les ministres, les préfets, les maires incitent la gendarmerie à fournir des renseignements sur l’esprit public, à opérer des arrestations politiques, à surveiller les opposants, à participer avec zèle aux élections et à se transformer en instrument de propagande.
Lors de la Commune de Paris, la gendarmerie dispose d’un régiment à pied, de deux régiments à cheval (2 800 hommes), de 2 500 gardes républicains et de 130 gendarmes de la compagnie de la Seine. Cette troupe qui a contribué à la défense de la capitale est disciplinée mais ne peut s’opposer à la foule. La gendarmerie constitue l’arrière-garde des militaires et des civils qui se replient sur Versailles. Elle contribue aux opérations militaires d’avril 1871, défend Meudon puis organise la poursuite des fédérés en déroute, participe aux combats à l’ouest et au nord de Paris, à Courbevoie, à Neuilly, à Gennevilliers. Avec l’avancée de l’armée dans Paris commence la Semaine sanglante (du 21 au 28 mai), la gendarmerie est aussi victime de la violence des insurgés. Mais ayant participé à l’écrasement de la Commune, elle gagne la confiance du gouvernement de Thiers tout en demeurant, aux yeux d’une partie de la gauche, le symbole d’une force politique de répression.

LA GUERRE ET LES MISSIONS EXTERIEURES DE LA GENDARMERIE

Sous le Second Empire, la gendarmerie se constitue en prévôtés pour surveiller les armées, exercer une police militaire et protéger les populations contre le pillage et les violences. Des militaires sont ainsi retirés des effectifs des brigades pour assurer leur mission lors de la guerre de Crimée (1854-1856), d’Italie (1859), durant l’expédition franco-anglaise de Chine (1860), la guerre du Mexique (1862-1867), et enfin au moment du conflit franco-allemand de 1870-1871. Les prévôts ont juridiction sur les vivandiers, cantiniers ainsi que toutes les personnes à la suite de l’armée. Ils surveillent aussi les vagabonds, les prisonniers de guerre, les déserteurs. Par ailleurs, la gendarmerie participe à la guerre sous forme d’unités constituées. Durant la guerre de Crimée, deux bataillons du régiment de gendarmerie à pied de la garde impériale participent au conflit et se distinguent notamment lors de la bataille de Sébastopol.
Lors de la guerre de 1870, la gendarmerie est organisée en régiments de gendarmerie à pied et à cheval. Un régiment à cheval est destiné à la défense de Paris et composé de près de huit cents hommes. Ces troupes se distinguent notamment à Châtillon et à La Malmaison. En novembre 1870, deux régiments de marche de gendarmerie à cheval sont levés au sein des légions ; un régiment de marche de gendarmerie à pied se rassemble à Bourges. Des escadrons de gendarmerie sont encore formés à Lille, ainsi qu’une compagnie de la Sarthe pour renforcer la 2e armée de la Loire. Tous ces régiments de marche sont destinés à participer aux combats et à surveiller les fuyards. Sur le plan strictement militaire, deux généraux de brigade de gendarmerie (Fauconnet et Deflandre) trouvent la mort lors des combats. Les gendarmes s’illustrent notamment à la bataille du Mans (janvier 1871).

Par ailleurs, dix-sept légions sont appelées à participer aux prévôtés. Les gendarmes sont tenus d’occuper de jour et de nuit les gares et les points stratégiques pour y exercer une fonction de police militaire ; ils recherchent aussi les déserteurs, les fuyards et les militaires circulant sans papiers, recueillent encore les armes, les munitions ou les effets d’équipements abandonnés, patrouillent enfin pour opérer l’arrestation des espions et des suspects. En janvier 1871, il faut instituer des brigades temporaires composées d’auxiliaires recrutés parmi les sous-officiers en retraite pour assurer l’ordre intérieur. Une fois la guerre terminée, les régiments ayant combattu sont progressivement licenciés, ce qui permet aux gendarmes de rejoindre leur compagnie départementale.
Quant à la gendarmerie coloniale, présente en Algérie depuis 1830, elle est également en fonction dans les autres colonies, en Guadeloupe, en Martinique, en Guyane, à la Réunion sous la forme de compagnies, à Saint-Pierre-et-Miquelon, en Nouvelle-Calédonie, à Tahiti et au Sénégal sous la forme de détachements. Dans l’ensemble, la présence de l’Arme dans les colonies augmente sous le Second Empire.