SOCIÉTÉ NATIONALE DE L'HISTOIRE ET DU PATRIMOINE DE LA GENDARMERIE | SOCIÉTÉ DES AMIS DU MUSÉE DE LA GENDARMERIE

LES REGLES DE BASE

L’insigne militaire résulte d’une alchimie complexe. Nous l’avons vu, il doit identifier une unité ou une communauté ; il peut aussi témoigner de la possession d’une formation. Sa composition résulte donc de la combinaison de règles anciennes (l’héraldique), du choix de symboles expressifs matérialisant l’unité ou la formation, et d’un souci permanent de l’esthétisme. Ce dernier point est important â souligner, et toute la difficulté consiste souvent à ne pas tomber dans les deux travers qui guettent les créateurs : réaliser un logo ou créer une  » carte de visite  » où l’on tente de tout faire figurer.

L’HERALDIQUE

La science de l’héraldique obéit à des règles strictes établies depuis le Moyen Âge. En effet, déjà, l’élaboration d’un écu ne se faisait pas à la légère : les couleurs, les motifs retenus et les charges figurant dans l’écu avaient leur importance et étaient porteurs d’une signification. Ces armes, primitivement choisies par un chevalier, entrèrent progressivement dans le patrimoine d’une famille et constituèrent parfois un message destiné aux adversaires éventuels.
Ces règles ont traversé le temps et sont encore pour la plupart en vigueur de nos jours. Par ailleurs, l’héraldique se décline aujourd’hui sous trois formes, sources d’inspiration pour les concepteurs d’insignes : la symbolique territoriale. La symbolique fonctionnelle. la symbolique historique. L’écu doit en outre répondre à des normes esthétiques, dont une concerne les dimensions. En effet, il est souhaitable qu’il ne dépasse pas 60 mm en hauteur et 40 mm en largeur.

LES PARTITIONS DE L’ECU

Il arrive qu’un écu ne présente qu’une seule couleur; on dit alors qu’il est plain. Il peut aussi être divisé géographiquement. Il est ainsi loisible à chacun de diviser des armoiries familiales, ou d’en créer d’autres qui sont voisines. Dans l’hypothèse où la création résulte de traits qui séparent l’écu en nombre pair, on obtient alors des partitions. La répartition des couleurs peut se faire différemment dans l’écu. Toutefois, il convient de respecter les divisions du champ et les partitions enseignées par la science héraldique. Dans tous les exemples suivants, les couleurs ne sont pas liées aux partitions. Elles ne sont utilisées qu’à titre d’illustration. Les principales partitions ne résultent que de l’utilisation d’un se trait, comme l’illustrent ces quatre premiers exemples :

 L’usage d’autres combinaisons résulte le plus souvent de la multiplication par deux ou quatre des traits. Ces modifications donnent naissance aux écus suivants :

Les multiplications suivantes, lorsqu’elles deviennent complexes, se nomment les rebattements qui correspondent à des pièces ou à des partitions de couleurs à l’intérieur du champ de l’écu. Nous énumérerons ici quelques exemples. Les lecteurs sont invités à consulter des traités d’héraldiques pour compléter le sujet.

La science héraldique distingue dans un écu neuf positions ou points : ils indiquent les différentes places où peuvent s’inscrire les meubles ou les figures.
Le blasonnement se fait toujours face au porteur de l’écu, tel qu’il se présente ci-après. En effet, l’écu où figurent les armoiries était présenté face au héraut d’armes chargé de les blasonner lors des tournois. Les règles de l’héraldique prévoient donc qu’un écu se lit toujours de face en commençant par la droite. Lorsque l’on examine l’écu de face, le sommet est nommé chef, la partie droite de l’écu se nomme le flan senestre, et la partie gauche le flan dextre.

LES CHARGES DE L’ÉCU

A la différence des partitions qui résultent de traits, il figure sur le champ des pièces posées ou ajoutées qui remplissent la surface. On les nomme des charges car elles ne naissent pas de la composition primaire de l’écu.

Les pièces honorables sont au nombre de trente et ont la caractéristique commune de toucher le bord de l’écu. Ces pièces sont d’un emploi très courant dans la composition des écus. Elles couvrent théoriquement le tiers de la surface de l’insigne, comme ‘l’illustrent les exemples précédent.


Les figures

Ce sont des illustrations inspirées par le corps humain, la faune ou encore les végétaux. Elles peuvent être représentées en tout ou partie mais il est recommandé de ne pas faire apparaître sur un écu des paysages, des nombres ou encore des sigles utilisés pour identifier la formation. De même, il semble délicat de faire apparaître des matériels, car lorsque ces derniers sont retirés du service, l’insigne de la formation devient obsolète.

Les pièces modifiées

Ce sont des pièces honorables modifiées dans leur tracé et leurs dimensions.

Les meubles

Ce sont des  » pièces moins honorables  » de taille plus réduite. C’est en effet la taille qui leur permet de pouvoir occuper différents emplacements sur l’écu, leur mobilité leur octroyant ainsi ce nom de meubles.

Le choix des meubles est d’une grande importance. Il doit résulter d’une étude approfondie et précise des caractéristiques de la formation. II convient en effet de sélectionner des objets chargés de symboles forts et significatifs. Rappelons-nous qu’au-delà des couleurs, c’est bien souvent le motif principal du champ qui attire le regard.

L’APPLICATION A LA SYMBOLIQUE MILITAIRE

La prise en compte de la symbolique militaire par le SHGN intervenue en 1996 a permis de définir des règles pour l’homologation des insignes. Le schéma est le suivant : l’unité adresse sa demande au SHGN par la voie hiérarchique et celle-ci est ou non revêtue des différents avis. Le projet en couleur, à l’échelle 1, puis agrandi aux deux-tiers, accompagné d’une notice explicative relative à la forme et au choix des symboles, sera alors examiné par la section Patrimoine, Symbolique, Traditions et Commémorations du SHGN . Le projet peut être éventuellement corrigé en liaison avec l’unité émettrice. Dès que le dessin rassemble les conditions propres à l’homologation, la décision est présentée à la signature du chef du SHGN qui homologue la pièce au nom du ministre de la Défense. Au-delà de cet aspect administratif, il convient de souligner que l’examen des projets répond à des normes et des critères définis par des textes réglementaires, qui ont peu évolué depuis 1945. L’insigne militaire doit être sobre et de bon goût ; il doit mettre en valeur l’histoire et le patrimoine d’une formation. Il est le support de la filiation et de l’héritage des anciens et, doit à ce titre, faire ressortir la noblesse du métier des armes. Sa composition résulte donc du respect de ces principes associé à des règles élémentaires de l’héraldique, science du blason.

LES SYMBOLES ESSENTIELS

Au-delà des éléments de la symbolique militaire présentés ci-dessus, il convient aussi d’examiner les différents symboles présents sur les tenues des militaires de la Gendarmerie nationale. Ceux-ci sont importants car ils véhiculent des messages et matérialisent une tradition ou un héritage. Parfois, au fil du temps, la représentation physique a pu changer mais le symbolisme reste identique.

La grenade

La grenade, ou bombe enflammée, ne fait pas partie du patrimoine symbolique de la maréchaussée. Elle apparaît avec la création de la Gendarmerie nationale et son attribution aux grenadiers gendarmes chargés de protéger la représentation nationale. Dès 1797, elle fut étendue à toute la gendarmerie. Elle fut d’abord portée sur les retroussis, les collets, les coiffures puis prit au fil des années une place de plus en plus grande sur les uniformes et les équipements. Celle-ci avait l’avantage d’identifier clairement l’homogénéité de l’institution malgré la diversité des missions et des spécialités. Symbole des unités d’élite depuis l’Ancien Régime, la grenade de la gendarmerie est unique au sein des armées par sa représentation à huit flammes or ou argent.

Le galon d’élite

Dans la nomenclature administrative, le terme approprié est celui de galon ruban ; il s’agit en fait d’un ruban de textile qui borde le sommet des képis des militaires de la gendarmerie.Il est argent pour la gendarmerie départementale et les formations qui lui sont rattachées, or pour la gendarmerie mobile et les officiers et gradés de la Garde républicaine, écarlate pour les gendarmes de la Garde républicaine, bleu pour les gendarmes adjoints, et gris cendré pour les militaires du corps de soutien de la gendarmerie. Dès la première instruction sur la tenue des nouvelles maréchaussées, il était prévu qu’un large galon d’argent borde les chapeaux. Cet attribut a depuis presque toujours été présent sur les différentes coiffures des militaires de la maréchaussée et de la gendarmerie. Sous l’Ancien Régime, il figurait aussi sur les coiffures des unités de la maison du Roi et, à ce titre, la maréchaussée s’enorgueillit de ce privilège.

Les aiguillettes

Initialement simple accessoire vestimentaire, l’aiguillette est devenue un attribut distinctif de la cavalerie puis des troupes d’élite. Celle-ci appartient au patrimoine de la gendarmerie depuis que son port fut rendu obligatoire pour la maréchaussée en 1720. L’aiguillette était à l’époque de soie blanche.
Selon les régimes politiques et les évolutions de l’uniforme, elles furent portées, soit à droite, soit à gauche. Le grade ou la fonction du porteur fut aussi, selon les époques, identifié par un code de couleurs : écarlate, bleu, blanc ou panaché. A l’heure actuelle, elles sont portées à gauche avec les deux nattes sur la poitrine et sont en textile blanc. Les ferrets sont or ou argent selon la subdivision d’arme. Pour la Garde républicaine, elles sont panachées or et écarlate avec ferrets or et sont placées avec les brins et nattes apparentes sur la poitrine du fait du port de la tunique. En 1885, la tête de Méduse prit place sur les médaillons des ceinturons porte-épée des officiers. De nos jours, ce symbole figure toujours sur l’ensemble des ceinturons de cérémonie des militaires des unités de la gendarmerie mobile, de la gendarmerie départementale et de la Garde républicaine.
En fait, le symbolisme de cet attribut est d’une triple nature. Le fait de posséder la tête de Méduse sur un ceinturon, pièce qui supporte l’arme, évoque la puissance des militaires de l’institution dépositaires de la force publique relevant de l’autorité légale.Le statut militaire est ici illustré par le fait qu’Athéna, déesse de la guerre, fut la première à utiliser ce symbole. Enfin, le message induit par le choix de Méduse montre clairement que tout doit céder à la loi et que les malfaiteurs ne peuvent être que  » pétrifiés  » devant la force publique.

Les couleurs de l’uniforme

L’uniforme de la maréchaussée, tel qu’il était codifié par l’ordonnance du 16 mars 1720, reprenait les couleurs de la livrée royale et se composait principalement du bleu de France. A cette nuance s’ajoutait le rouge et le jaune pour des buffleteries. De manière générale, le bleu figura toujours sur les uniformes de la gendarmerie, jusqu’à devenir presque noir pour les vestes à partir de 1921. Le bleu est une nuance intimement liée à l’histoire de France. Selon diverses légendes, elle fut choisie par Clovis (il s’agissait en fait d’un morceau de la cape de saint Martin) pour protéger les troupes lors des combats. Les uniformes, selon les régimes, virent le jaune apparaître sur les culottes ou les plastrons. Le rouge orna souvent les retroussis et se trouve encore présent sur les tenues des cavaliers et motocyclistes. Le blanc figurait sur les uniformes, mais essentiellement sur les attributs distinctifs (aiguillettes, aigrettes, etc.) ; il est en fait un symbole de commandement et d’honorabilité. Actuellement, les tenues de la gendarmerie arborent encore les nuances de son illustre devancière, la maréchaussée, cela malgré les siècles écoulés, les changements de régime et les contraintes de l’évolution des effets d’uniforme.